Petite histoire des entités et autres esprits

Le vocabulaire a changé; dans les années 80 et 90, on parlait de channeling comme J.Z. Knight, qui comptait Shirley MacLaine parmi ses clientes, et qui était en contact permanent avec Ramtha, un guerrier mort il y a 35 000 ans, alors que Kevin Ryerson préférait discuter avec l’apôtre Jean. Au Québec, on préfère maintenant le terme “entité”. C’est que le vrai terme, “l’esprit”, “le spirite”, gêne un peu.

Où allons-nous après la mort? Dans la Bible, le roi Saul consulte une sorcière qui interroge l’esprit du prophète Samuel. Les Grecs interrogeaient l’oracle de Delphes. En fait, dans toutes les cultures, on retrouve ces personnes qui prétendent être capables de communiquer avec les esprits de personnes décédées. Mais ce n’est qu’au siècle dernier, lors de la grande vague spirite qui déferla en Occident, que des scientifiques ont sérieusement étudié ce phénomène et tenté de communiquer avec l’au-delà.

Le spiritisme contemporain est né en 1847 à Hydesville, dans l’État de New York. Les filles du fermier John Fox avaient entendu des esprits frapper aux portes; elles ont alors conçu un code de signaux et de questions pour permettre à l’esprit de s’exprimer. En bons fantômes, c’est ce qu’ils firent. La nouvelle de cette expérience se propagea et les sœurs Fox devinrent célèbres, organisant de multiples séances au cours desquelles les esprits se manifestaient. Bientôt, partout aux États-Unis comme en Europe, d’autres médiums se sont mis à offrir, eux aussi, leur transes et leur pouvoir aux adeptes. Les séances avaient toujours lieu dans une pièce obscure. On s’assoyait autour d’une table et l’esprit, à la demande du médium, répondait aux questions. La plupart du temps, l’esprit s’exprimait par des coups sur la table pour signifier oui ou non. Des esprits plus expressifs pouvaient pencher ou même lever la table.

Il y avait bien sûr des curieux, mais aussi des gens inconsolables de la perte d’un être cher et qui s’accrochaient à la croyance et à l’espoir qu’ils pourraient encore communiquer avec lui. D’autres cherchaient dans le spiritisme la preuve qu’il y avait bel et bien une vie après la mort. Dans le contexte du matérialisme du siècle dernier, la preuve de la vie après la mort suscitait un grand intérêt et on a même vu des Églises pousser autour de cette noble cause. Et il y avait les scientifiques.

Réunis autour de sociétés sérieuses comme The London Dialectical Society, The Society for Psychical Research, The American Society for Psychical Research, L’Institut métaphysique et l’Association française d’étude métaphysique, des scientifiques étudiaient le phénomène du spiritisme en appliquant la même objectivité que s’il s’agissait de sciences physiques naturelles. Ils maintenaient que la connaissance de la nature était encore incomplète et qu’il ne fallait pas s’étonner si certains événements ne pouvaient être expliqués par des théories connues.

Ces chercheurs savaient que beaucoup de séances de spiritisme étaient en fait des supercheries, mais ils estimaient que « si un seul cas sur 1000 s’avère réel, la science a le droit et le devoir de faire enquête pour chercher à résoudre l’énigme». Malheureusement, pas un seul cas ne put être scientifiquement prouvé.

La vague de spiritisme atteignit son apogée à la fin du XIXe siècle et se poursuivit même jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale. C’est alors que des magiciens célèbres comme Houdini affirmèrent pouvoir expliquer et reproduire n’importe quelle apparition de l’au-delà. En même temps, les psychiatres commençaient à attirer l’attention sur les puissances du subconscient et de la psyché humaine. Les esprits venaient de recevoir un coup mortel. Ce qui ne devait évidemment pas les inquiéter!

Même si l’histoire du spiritisme est truffée de fraudes, de manipulations et d’absurdités chroniques, le désir de communiquer avec l’au-delà est toujours présent. Pour les croyants, les preuves ne sont pas nécessaires. Pour les sceptiques, aucune preuve ne sera suffisante.

Liens :

Les premières médiums
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L’esprit troué
Peut-être qu’au fond, j’ai l’esprit fermé. Peut-être qu’au fond, les astrologues, les liseurs de bonne aventure, les devins qui voient l’avenir dans les entrailles des poulets et autres pushers de singeries paranormales, c’est ben correct.
(Patrick Lagacé, La Presse)

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