Je sais que je n’arrête pas de me plaindre. Mais franchement, faire autrement, c’est difficile.

Aujourd’hui, je me suis rappelée du secondaire. Le bon vieux temps où rien n’était sérieux, où la plupart des cours étaient des périodes libres, où les plus pénibles pouvaient s’épanouir, où c’était écrit sur le front des enseignants : « si vous voulez partir, je vous en prie, faites-le sans remords, vous n’aurez aucune pénalité et tout le monde sera heureux. » J’en avais profité, mais aussi beaucoup bavé. Perdre son temps par obligation, c’est frustrant.

J’ai donc fait un retour en arrière ce jour-là. Cela faisait deux cours annulés de suite, tous deux à la dernière minute, avec une froide notification par internet reçue à peine quelques heures avant. « Vous avez (1) cours annulé aujourd’hui. » Notre professeur nous avait par la suite envoyé un petit message dans notre boîte de courriels pour nous avertir que le remise de notre projet final, dont j’ai fait mention dans une autre chronique (voir Une vie au cégep – Comment obtenir un statut), avait été reporté d’une semaine, ainsi qu’un autre petit test pour lequel j’avais préparé une feuille de notes.

Donc, au troisième cours, je suis inquiète. Je ne veux pas m’être présentée pour rien encore une fois. Mais non. Je vois en avant de la classe un visage rayonnant. C’est un remplaçant, qui n’a pas encore terminé sa formation en pédagogie et qui attend patiemment d’avoir un poste d’enseignant. Entre temps, il a été sélectionné dans sa cohorte pour remplacer mon professeur d’histoire.

Sympathique, le gars. Il écrit le plan de cours au tableau comme moi j’écrirais, c’est-à-dire mal. Il a la gentillesse de nous envoyer le Powerpoint par courriel, alors, plus personne n’a besoin de prendre de notes, c’est la joie. Il s’exprime bien : « Les questions du prochain examen sont de type “longitudinal”. » Ça m’éclaire. Et il nous donne des trucs mnémotechniques phénoménaux.

« C’est quand la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis? » Silence radio. « C’est quoi le nom de l’équipe de basket, vous savez, l’équipe américaine? » Un gars lève mollement la main. « 76ers… » « Ben oui! Pour 1776. D’ailleurs, vous savez l’équipe de hockey junior, les Ottawa 67? C’est pour 1867, la Constitution du Canada. » « Ouin, ben c’est laid 67, ça fait Expo 67. »

La fille à côté de moi me montre son projet final, qu’elle avait bâclé, et qui avait été reporté. « Je n’ai jamais écrit un texte aussi vite. J’étais stressée, je pensais que j’avais le temps… Pi en fait, tu vois j’avais le temps. Haha. Je vais t’envoyer ça par courriel pour que tu corriges. »

Ouin. Disons.

Le prof pendant ce temps continue ses questions. « C’est quoi la Révolution Française? » Le même mou lève la main. « Ben, c’est en France, là… » « Vois-tu ce diagramme au tableau ? » « Non, je vois mal… » « Alors pourquoi tu t’es mis au fond de la classe ? »

Moi, j’avais le goût de lever la main et de dire « S’il vous plaît, pouvez-vous arrêter de nous poser des questions? Vous ne voyez pas qu’on est cons? »

Et il nous donne deux questions pour l’examen final : une sur l’évolution du christianisme et son importance en Occident, et l’autre sur la démocratie athénienne. Le jour J, on répondra à celle de notre choix. J’ai choisi celle sur la démocratie athénienne, on l’étudie depuis le secondaire.

Moi qui pensais que j’étais plutôt faible en histoire… mais personne n’est faible au cégep. Je vais peut-être finir par le comprendre un jour.

Pour les autres chroniques : http://kiosquemedias.wordpress.com/category/chroniques/une-vie-au-cegep/