Mon premier James Michener : la brique dans le front
La brique d’un millier de pages est la longueur moyenne des romans de James Michener. Déception: ça commence avec une banale amourette entre deux archéologues, l’un chrétien, l’autre juive. Leur équipe effectue une fouille en Israël, sur une colline appelée Makor, « la source » en hébreu… À mesure qu’ils creusent, et que leur passion oscille, ils trouvent des artefacts de plus en plus anciens. On croit que ça continuera sur ce ton.
C’est là que la brique nous tombe dessus. Les chercheurs découvrent une faucille désarticulée datant de l’âge de pierre, et on basculte quelques milliers d’années dans le passé.
Là, on suit la famille d’Ur qui, la première, a tracé le chemin vers l’agriculture et énoncé l’idée d’un être suprême et créateur. Elle est l’ancêtre d’une longue lignée de juifs. On s’attache aux personnages qui plantent les premières céréales de l’humanité, et le chapitre se termine. On retourne à la fouille de 1964 et à nos deux amoureux.
Un motif se forme, et le roman prend une toute autre allure. On avait déjà oublié l’histoire d’amour. Tant mieux : il n’en sera plus question jusqu’à la fin du livre.
C’est ainsi que chaque artefact exhumé nous transporte vers des évènements antérieurs ayant marqué l’histoire juive. C’est de là qu’on assiste stupéfaits à la naissance des premiers cultes religieux, qu’on voit passer l’âge du bronze, les dernières années du roi David, la déportation des juifs en Babylone par le roi Nabuchodonosor II, et ainsi de suite, jusqu’à l’Holocauste et la naissance d’Israël. Chaque fois, nous suivons un personnage fictif qui a joué un rôle-clé dans ces évènements. L’aridité des références historiques passe dans nos cerveaux enchantés comme dans du beurre.
Enfin, notre histoire d’amour du début se dénoue. Plus de 500 pages ont tourné entre temps. Mais que l’amourette des achéologues est devenue puérile à présent pour nous lecteurs, après ce grand voyage à travers les âges…
Les romans de Michener sont maintenant traduits dans plus d’une cinquantaine de langues et vendus à une centaine de milliers d’exemplaires à travers le monde.
– par Naïma Hassert