Une vie au cégep #13 – L’autre cafétéria du cégep : la salle de classe
« Tu vas vraiment manger ça, là, maintenant ? »
Le grand sportif fronce les sourcils derrière ses deux sandwichs.
« Euh… oui. Il y a un problème ? »
« Non, non. » Le prof coule un regard oblique vers le jambon et le fromage qui déborde du pain à hamburger et sourit tristement. « C’est juste que moi aussi j’ai faim. »
Au cégep, tout le monde mange et boit joyeusement dans les classes. Ça vient avec les libertés nouvelles du cégep : au secondaire, on n’avait pas le droit de mâcher de la gomme, au cégep, on peut manger des poutines. Du moins, aucun règlement ne porte sur la nourriture en classe. Chaque jour, le café étudiant effectue 2000 transactions, sur 7000 étudiants au total. Si on prend en compte que la plupart des étudiants ont un, peut-être deux cours par jour, on conclut que ces transactions, ce sont des collations, pas le repas du midi. Collations qu’un étudiant sur trois amène probablement en cours, sûrement pour passer un moment un peu moins pénible. Sans compter les machines distributrices et la cafétéria, qui font probablement gonfler la statistique.
Une autre fois, c’était une fille, pauvre fille, qui a toujours des collations dans son sac. Cette fois-là, elle avait des biscuits emballés dans du plastique, celui qui fait du bruit quand on le froisse. Elle a eu de la difficulté à l’ouvrir, ça a dû lui prendre 30 bonnes secondes. Pendant ce temps-là, le prof parlait, et moi je n’entendais plus grand-chose, mais toute la classe a patiemment attendu qu’elle réussise à atteindre ses biscuits. Probablement pour ne pas la froisser, elle.
Mais manger, c’est important. J’ai même reçu ce conseil avec une feuille nous préparant mentalement à un examen : « N’oubliez pas que le travail intellectuel est comme une activité physique fort intense. Il faut donc penser à avoir avec soi des noix, des fruits, des fromages… Mais, de grâce, aucune poutine dégoulinante, parce que le gras ralentit dangereusement le cerveau. » Suivi d’un sympathique bonhomme sourire.
Ça donne faim.
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