Une vie au cégep #6 – Écouter en classe ? Pour quoi faire ?
La majorité de mes classes n’est pas composée d’étudiants, mais de gens qui n’écoutent rien.
La fois où je m’en suis rendue compte, en plein milieu d’un cours, j’ai eu une vague d’inquiétudes : on est tous foutus. La majorité d’entre nous coulera ses examens, nous n’aurons pas de diplôme, nous serons les reclus de la société ! J’ai alors écouté plus attentivement ce que racontait le sage diplômé devant moi.
Conclusion : tout ça est prévu dans le programme.
Rien de ce que raconte le professeur ne se trouvera effectivement dans l’examen. Il nous explique d’ailleurs pourquoi : la diapositive qu’il nous présente comporte surtout les définitions de mots que nous devrons y ressortir, et elle nous est distribuée par le portail Internet du cégep. Inutile, a priori, de prendre des notes quelconques. Comme notre jeune cerveau a déjà de la difficulté à saisir des concepts abstraits, dont les sciences humaines regorgent, c’est le seul effort qu’on lui demandera : de comprendre. Pas de retenir par cœur.
Et ce type de cours n’est pas une anomalie. Au contraire. Si on exclut le cours d’éducation physique, j’en ai cinq cette session-ci. Dans un de ceux-là, mon professeur a affirmé ne pas prôner la prise de notes. Il nous invite plutôt dans un voyage intellectuel : nous sommes évalués sur notre capacité à abréger des textes écrits en langue de bois. Une autre professeure nous abreuve de notes de cours toutes faites, et trois fois plutôt qu’une : sur diapositives en classe, en copies papier et par Internet. Impossible de les manquer, à moins de beaucoup le vouloir.
J’ai un cours qui est purement pratique. C’est un cours de photo, je sors dehors et je prends des photos, alors on n’en parlera même pas.
Le dernier cours est enseigné par la seule professeure qui ne veut pas envoyer ses notes de cours par courriel, elle doit trouver que c’est poussé trop loin. Alors, cette fois-ci, il faut se forcer un peu et recopier nous-même ce qu’elle a fait. Un cours actif sur cinq. Jolie statistique.
Ainsi, même si on meurt de fatigue à chaque cours parce qu’on a trop bu, même si on joue à des jeux d’ordinateur ou si on lit une bande dessinée pendant que le bonhomme en avant nous parle, on reçoit la matière toute cuite dans le bec. On pourrait tout aussi bien ne pas être là. Mais ça, c’est une autre chronique.
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