Québec et l'Irlande (Le), Culture, histoire, identité
Simon Jolivet, Isabelle Matte et Linda Cardinal
Le Québec et l’Irlande ont beaucoup en commun. La quête politique pour se sortir de l’Empire britannique, un catholicisme longtemps omniprésent et la lutte pour préserver la langue nationale sont autant d’éléments qui en font des sociétés comparables. De plus, les Irlandais font partie du paysage démographique du Québec depuis deux cents ans. Jusqu’au début des années 1900, ils y étaient plus nombreux que les Anglais, les Écossais ou tout autre groupe ethnoculturel, exception faite des Canadiens français. Majoritairement catholiques, ils ont profondément influencé la société: non seulement les traces de cette présence irlandaise sont palpables dans l’histoire, mais on peut encore les remarquer dans la culture, qu’elle soit musicale, littéraire, cinématographique, religieuse ou politique.
Les auteurs nous apprennent, entre autres, que la Société Saint-Patrick de Montréal a été fondée par des Irlandais protestants en 1834 pour contrer les aspirations des Patriotes, alors que d’autres Irlandais, tel Daniel Tracey, les appuyaient. L’Irlande et les Irlandais ont continué de marquer la société après 1960, en alimentant les productions des géants du monde cinématographique et littéraire québécois que sont André Forcier, Gilles Carle, Victor-Lévy Beaulieu et Jacques Ferron. Ce livre est donc une occasion unique de redécouvrir l’empreinte que l’Irlande et les Irlandais ont laissée au Québec ainsi que les liens qui unissent les deux nations.
Extraits de la Table des matières
Le Québec et l’Irlande | 1 | |
Les Irlandais et les Chevaliers du travail à Montréal, 1882-1890 (Peter Bischoff, Université d’Ottawa) | 21 | |
Les relations des Irlandais et des Canadiens français à l’aune des archives vaticanes (Matteo Sanfilippo, Università di Viterbo) | 50 | |
Diocèses, paroisses et écoles entre Irlandais et Canadiens français | 60 | |
L’Irlande dans les œuvres littéraires et cinématographiques québécoises | 149 | |
Démons violoneux contre prêtres vociférants : espace musical et hégémonie morale dans les campagnes irlandaises et québécoises (Gearóid Ó hAllmhuráin, Université Concordia) | 197 | |
VLB et l’esprit dublinois de la langue | 221 | |
POSTDACE • L’Irlande, les Irlandais et Nous (Éric Bédard, historien et professeur, TÉLUQ, Université du Québec) |
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Le Kiosque a publié: Petite histoire des Irlandais
Extrait
Des charniers flottants
Les Irlandais aimeraient mieux aller aux États-Unis, mais les Américains sont peu intéressés à recevoir des immigrants sans le sou et porteurs de typhus. On mobilise tout ce qui flotte et peut encore porter le nom de navire. On ajoute des banquettes de bois pour y installer les émigrants. Dans trois mois ils seront à Québec. Le taux de mortalité sur les navires oscille autour de 15-18%.
Pendant ce temps, au Canada, des officiels s’inquiètent. Le docteur Douglas, responsable de Grosse Île, avertit les autorités que selon ses informations 10,600 Irlandais se sont embarqués pour le Canada depuis le 19 avril. Les Britanniques n’avaient pas jugé bon d’avertir les Canadiens de l’ampleur des départs… Deux cents lits seulement sont disponibles à Grosse Île et on ignore tout de l’épidémie de typhus.
Le 14 mai 1847, le Saint-Laurent est encore recouvert de trois centimètres de glace lorsque le premier navire accoste à Grosse Île pour y subir la quarantaine. Sur les 241 passagers du « Syria», 202 passagers sont malades; 65 doivent être débarqués pour isolation. La petite Ellen Keane, quatre ans, trois mois, est admise à la quarantaine le 15 et meurt de fièvres la même journée. C’est la première victime.
Des familles sont désunies, des enfants se retrouvent seuls sur Grosse Île pendant que leurs parents sont autorisés à continuer sur Québec ou Montréal. La moitié des lits de Grosse Île sont déjà occupés et ce n’est que le premier bateau.