freud2Jacques Van Rillaer

SPS

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Dans les publications suivantes, Freud parle de dix-huit hystériques et deux cents neurasthéniques guéris comme par miracle. Mais sa correspondance privée montre, sans équivoque, qu’il s’agit de gros mensonges ! Voici les faits.

En 1896, dans une conférence à la Société de psychiatrie et de neurologie de Vienne, publiée le mois suivant, Freud déclare avoir « guéri » dix-huit hystériques grâce à la mise au jour d’expériences sexuelles « subies au temps de la première enfance », toutes refoulées. Ces guérisons sont pour lui la preuve que l’étiologie sexuelle se vérifie dans tous les cas [in allen Fällen]. Il ajoute, triomphant, « Je tiens cela pour un dévoilement important, pour la découverte d’un caput Nili [source 1=”Nil” language=”du”][/source] de la neuropathologie » [13]. Il précise que la mise en évidence de ces scènes fut très difficile, car leur souvenir n’était jamais conscient. Il lui a fallu « dans la plupart des cas au moins cent heures de travail d’analyse » [14]. Signalons au passage que Freud affirmera quelques années plus tard que les scènes étaient spontanément racontées par les hystériques, qu’elles n’étaient que des fantasmes et que c’est le refoulement de ces fantasmes qui avait rendu malade [15].

Les désillusions de Freud sur l’efficacité thérapeutique de sa méthode (2)

Durant les années 1890, Freud croyait faire des découvertes sensationnelles. Il écrivait à Fliess le 2 avril 1896 : « Je suis convaincu de pouvoir guérir définitivement l’hystérie et la névrose de contrainte, compte tenu de certaines conditions relatives à la personne et au cas ». À ce moment, il consommait de la cocaïne depuis 12 ans1… Par la suite, il a dû admettre qu’il ne faisait guère mieux que des confrères comme Janet, Forel ou Dubois. Les historiens du freudisme ont clairement mis en évidence l’impuissance de sa méthode pour des troubles sérieuxcomme des toxicomanies, des phobies importantes, des obsessions-compulsions, sans parler des psychoses. L’historien qui a présenté l’évolution du plus grand nombre de patients bien identifiés est le professeur Mikkel Borch-Jacobsen, qui a travaillé aux Archives Freud à Washington [29]. Son constat : sur trente et un patients, trois seulement ont bien évolué. L’état des autres n’a guère changé ou s’est détérioré. Certains patients ont fini à l’asile, d’autres se sont suicidés (trois suicides réussis, plus quatre tentatives).

À propos de Freud et de la cocaïne:

Petite histoire de la guerre contre les drogues

L’apôtre de la cocaïne

Âgé de 28 ans, Freud désespère d’épouser Martha Bernays, sa fiancée depuis trois ans. Il rêve d’une grande découverte scientifique qui assurerait son avenir financier et donc son mariage avec Martha.

En 1884, il lit le rapport de Theodore Aschenbrandt, un médecin militaire allemand. Ce dernier a acheté de la cocaïne pure à la compagnie Merck et l’a donnée aux soldats avant leurs manoeuvres dans les montagnes de Bavière. Freud lit qu’en dépit de l’ascension harassante, du mauvais temps et du froid, les soldats conservent une énergie étonnante. Freud est aussitôt enthousiasmé.

Il croit avoir trouvé le produit miracle, celui qui va le rendre célèbre et lui permettre de se marier. Il commande un premier gramme de cocaïne à Merck et en avale une petite quantité  (vraisemblablement une dose de 50 mg environ). Peu après, il est pris d’un accès de gaieté et éprouve un sentiment de légèreté. Ses doigts et ses lèvres lui donnent une sensation cotonneuse, puis de chaleur, et surviennent ensuite des bâillements suivis d’une certaine lassitude.

Freud se rend compte que la cocaïne engourdit la langue et les muqueuses. Il en parle à son collègue, l’ophtalmologiste Karl Koller.

Il renouvelle l’expérience; il ressent un sentiment d’assurance, de force accrue et peut se livrer à un travail intellectuel prolongé sans éprouver la moindre fatigue.

Son « vibrant pladoyer » de quelque 10 000 mots en faveur de la cocaïne paraît sous le titre Uber Coca (À propos de la coca) dans le numéro de juillet 1884 d’une revue médicale, la Centralblatt für die Gesamte Therapie. Il y résume les connaissances de l’époque sur la coca et le résultat de ses observations. Selon Freud, la cocaïne est le premier médicament capable de stimuler les centres nerveux et il la recommande pour traiter les mélancolies, les hypochondries et  les dyspepsies. Freud émet aussi l’hypothèse que la cocaïne aide à guérir de la morphine; il donne sept références qui toutes proviennent de la Therapeutic Gazette.

Grand bruit dans le monde médical.

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Puis le doute.

Freud prescrit de la cocaïne à un de ses professeurs morphinomanes, Ernst von Fleischl-Marxow, afin de traiter sa dépendance. Fleisch finit par s’en injecter un gramme par jour. Pure. C’est un échec retentissant que Freud n’a jamais voulu reconnaître; mais il ne touche plus à la cocaïne.

En mai 1886, Albrecht Erlenmeyer, un spécialiste de la dépendance à la morphine, accuse Freud d’avoir lâché le « troisième fléau de l’humanité », après l’opium et l’alcool. Un an plus tard, le British Medical Journalexplique que « la réaction indéniable contre les qualités extravagantes prêtées à ce remède l’emporte déjà.»  Freud réagit en juillet par un article qui défend passionnément la cocaïne. On s’engueule pendant des années. Puis, la compagnie pharmaceutique allemande Bayer annonce qu’elle a enfin trouvé la solution à la dépendance à la morphine.

À propos de Freud et de la psychanalyse:

La folle histoire de la folie

L’affaire Osherhof

Au début des années 80, Raphael Osherhof, 42 ans, un néphrologue, subit une profonde dépression à la suite d’une année difficile. Il devient agité et suicidaire. Incapable de dormir, perdant du poids, il abandonne sa pratique médicale. Il est hospitalisé au Chestnut Lodge à Rockville (Maryland), un hôpital spécialisé en thérapie analytique où il passe sept mois. On refuse de lui donner des médicaments et il doit suivre quatre sessions de psychothérapie par semaine. On veut qu’il régresse à l’enfance, moment où un traumatisme serait survenu, et construire à partir de là. Mais le traitement ne marche pas. À la fin de son séjour, il est encore agité, a perdu 40 livres et a toujours une insomnie sévère.

Désespérée, sa famille l’envoie à un autre hôpital, à Silver Hill. On lui donne des antidépresseurs et en quelques semaines, Osherhof est rétabli et peut retourner pratiquer la médecine. Mais pour lui avoir fait perdre plusieurs mois de sa vie, Osherhof décide de poursuivre l’hôpital Chestnut Lodge … et gagne. Cette histoire devient une cause célèbre en psychiatrie. Le traitement de la dépression sévère par les médicaments est tellement connu qu’en privant Osherhof de ce traitement, l’hôpital a commis une faute professionnelle.

Edward Shorter dans A History of Psychiatry, n’hésite pas à écrire “By the 1990s a majority of psychiatrists considered psychoanalysis scientifically bankrupt”