En avril 2009, le journaliste Benoît Aubin écrivait dans « Le culte du secret » :

«Vue de l’extérieur, la Fédération des commissions scolaires a facilement l’air d’une petite fiole peinarde, qui ne fait pas de vagues, qui ne se fait pas de souci (son budget est indexé automatiquement) et qui “rend des services” à des clients, les commissions scolaires, qui ne sont pas elles-mêmes des modèles parfaits d’efficacité, de transparence ou de pertinence. »

Un mois plus tard, Josée Bouchard devenait la nouvelle présidente de la Fédération des commissions scolaires du Québec.

Josée Bouchard

Pourquoi ce spécial sur Josée Bouchard, la présidente de la Fédération des commissions scolaires? Parce qu’elle le vaut bien.

Depuis que Josée Bouchard est en poste, ses déclarations oscillent avec une constance qui force l’admiration, entre le lieu commun franchement sublime et le jugement d’une enfant du primaire (premier cycle).

Sur la popularité des écoles privées, elle a dit: « Il y a une question de perception, mais il y a aussi des réalités. On est dans un monde de surconsommation et ça fait partie de l’image de la réussite d’envoyer son enfant à l’école privée. »

Au sujet des 65 % de gars inscrits dans certaines commissions scolaires qui n’avaient pas obtenu le moindre diplôme, elle a affirmé «qu’il faut redoubler d’ardeur» et élaborer des projets qui accrochent les jeunes à l’école. «Quand on dit qu’il faut y travailler, ce n’est pas pour rien, indique-t-elle. Ce sont des données qui correspondent à ce qu’on connaissait. C’est ce pour quoi on travaille aussi intensément.»

Sur le dernier rapport du vérificateur général indiquant que les commissions scolaires font peu d’efforts pour réduire leurs frais d’administration. La réponse de Josée Bouchard a repoussé encore plus loin les frontières de l’insignifiance : «Laisser croire» à une mauvaise gestion, «volontairement ou par méconnaissance», alimenterait, selon elle, le discours en faveur de la privatisation des services publics.

Au sujet du Renouveau pédagogique qui ne semble pas avoir tenu ses promesses.

Le Professeur masqué écrit:

« Mon petit plaisir réside dans les propos de la présidente […] Josée Bouchard. Celle-ci est “étonnée” et “s’explique mal ces résultats” “Je trouve ça inquiétant. Si c’est bel et bien le cas, je vous avoue ma surprise. L’école est tellement intéressante aujourd’hui! On a implanté l’approche par projet, le travail d’équipe, des projets particuliers… Tout ça pour répondre aux besoins des jeunes.”
Pour madame Bouchard, les médias seraient en partie responsables de cette mauvaise perception: “On a tellement dit aux jeunes qu’ils étaient des cobayes que ç’a dû avoir un impact.” »

Parmi les commentaires pertinents du Prof masqué, notons ceux-ci :

« Premier constat: Mme Bouchard ne semble pas vivre dans la même réalité qu’une majorité de gens. Elle est «surprise» par ces résultats, car l’école est «intéressante» à ses yeux. Or, il suffit de connaitre un tant soit peu la réalité scolaire pour réaliser que cette vision est idyllique à bien des égards. »

« [P]our Mme Bouchard, l’école semble être définie selon sa capacité à «intéresser» et à satisfaire les «besoins des jeunes». Je m’interroge toujours quand on tient ce genre de discours. N’amorce-t-on pas une lente dérive quand on raisonne de la sorte? Est-ce qu’apprendre fait partie des besoins de certains jeunes? L’école doit-elle être fondamentalement intéressante ou pertinente pour un jeune? Doit-elle se baser sur la notion de plaisir ou de nécessité ou un mélange équilibré des deux? »

Le Kiosque tient à partager une anthologie de la langue de bois de Mme Bouchard truffée d’un choix judicieux de clichés comme:

« la concentration des facteurs de vulnérabilité… »

« invite maintenant tous les partenaires à demeurer mobilisés »

« le réel succès de la rencontre »

« les actions concrètes »

« la recherche du plus juste équilibre en vue d’une intégration réussie »,

« Que le plan d’intervention permette réellement »

« afin d’établir une réelle collaboration »

Puis, un reportage sur les écoles à charte en Alberta a déclenché la furie de Josée Bouchard.

Les directeurs d’école du Québec ont affirmé que ces institutions sans commission scolaire constituent «une école de rêve». Josée Bouchard s’en est prise à la porte-parole des directeurs d’école, Chantal Longpré, en l’accusant de «faire de la politique ». «Je l’invite à mettre sa face sur des poteaux dans quatre ans, si elle veut faire de la politique, a pesté Josée Bouchard. Elle contribue de façon magistrale à la dévalorisation de notre système d’éducation.»

N’ayant pas peur des mots, elle a déploré ce qu’elle qualifie de «croisade» pour «essayer d’écraser» les commissions scolaires, un mouvement qu’elle associe à la montée des idées «de droite.»

Histoire de renipper l’image des commissions scolaires Josée Bouchard s’est offert une tribune par l’entremise d’un publireportage payé par nos taxes «Une carrière en éducation, le meilleur moyen pour faire une différence», publireportage paru dans Jobboom, vol 11, no 3, mai 2010, p.25.)

« Elle déplore que les médias, lorsqu’ils parlent d’éducation, choisissent souvent de rapporter des événements isolés qui sont loin de représenter le quotidien des enseignants, des enseignantes et des professionnels de l’éducation. Josée Bouchard souligne que le Québec a l’un des meilleurs systèmes d’éducation au monde et qu’il faut en être fier. »

(Maurice Duplesis aussi disait qu’on avait le meilleur système d’éducation au monde.)

Tout va donc très bien dans les commissions scolaires, sauf un délicat problème d’image. Aussi, au début de l’année 2011, les commissions scolaires étaient invitées à verser une «contribution volontaire» à leur fédération, donc à Josée, afin de l’aider à mettre en place un vaste plan de communication. L’objectif qu’elle vise : un quart de million de dollars.

Rien n’y fait : l’ADQ, les jeunes libéraux, le Parti vert, les directeurs d’école veulent tous, chacun à leur façon, la fin des commissions scolaires parce qu’ils ne les jugent plus utiles, tout simplement.

Puis la coalition Legault a osé dire la même chose. Joseph Facal a commenté la réaction de Josée Bouchard qui dénonce l’ancien ministre de l’Éducation:

«Le ton est hargneux, lapidaire et à la limite de l’irrespect. Visiblement, ce ne sont pas deux petits fils qui se sont touchés chez Mme Bouchard, mais un gros câble qui a sauté. »

« La position de M. Legault, écrit Mme Bouchard, serait “peu documentée, partielle, populiste, empreinte de préjugés et de clichés”. Elle serait aussi “anti-système public”, “anti-parents”, “anti-commissions scolaires”, “anti-équité”, “antidémocratique » et contre la “justice sociale”. Rien de moins. »

Mais elle est obligée de constater que le message de la FCSQ «ne passe pas». D’où une entrevue commentée par le professeur masqué.

La présidente de la FCSQ en entrevue: un moment plutôt gênant, relaté par le Professeur masqué :

«Ce que l’on comprend en écoutant Mme Bouchard, c’est qu’elle reconnait – avec humilité – que le message de la FCSQ «ne passe pas». Pourtant, avec une équipe de communication et des millions de budget de fonctionnement, la chose m’apparait assez incroyable. Elle a annoncé un plan qu’elle ne connait pas encore, parlé d’outils de gestion qu’il faudra commander pour mieux suivre les élèves… Elle ignorait combien a couté le dernier congrès que son organisme a pourtant organisé. Elle invitait l’animateur à amorcer un virage à 180 degrés alors qu’il lui parlait d’un congrès au Reine-Élisabeth… Elle affirmait que les CS hausseront d’un cran leurs exigences, mais refusait d’être questionnée sur les pratiques de celles-ci. Bravo pour la rédition de compte et la transparence!»

…………………………

À l’époque où la peine de mort était appliquée en France, on disait que rien ne concentrait autant la pensée du condamné, le matin de son exécution, que la vue de la guillotine. C’est ce qui se passe avec Josée Bouchard. François Cardinal écrivait: «Devant la menace du couperet, la Fédération des commissions scolaires fait son mea culpa. À genoux, les mains jointes, sa présidente implore ses détracteurs de lui laisser la vie sauve.»

Et elle promet un plan d’action comprenant une série de mesures pour simplifier l’administration des commissions scolaires et redorer le blason des écoles publiques.

Josée Bouchard avait néanmoins peu de détails sur la nature de ces mesures, se contentant de préciser qu’elles seraient « concrètes » et qu’elles auraient certainement un impact sur l’ordre du jour des conseils des commissaires au Québec.

http://www.radio-canada.ca/nouvelles/societe/2011/08/28/001-commissions-scolaires-revision.shtml

Mme Bouchard a par ailleurs promis que les projecteurs seraient braqués sur les résultats des élèves et leur potentiel, et ce, afin de favoriser leur diplomation.

Les projecteurs braqués sur le potentiel….

Cré Josée!

Une dernière avec le professeur masqué

Incohérence de la présidente de la FCSQ?

« Le 29 août dernier, dans une entrevue à Dutrizac, la présidente de la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ), Josée Bouchard, déclarait qu’on verrait des changements à 180 degrés quant à la gestion de ces dernières «dès cette année» (à 7 minutes 35 secondes). «Au mois d’octobre, à la fin octobre, je devrais vous revenir là-dessus avec, comme on dit, une liste très concrète d’actions qui vont être mises en branle», précise-t-elle (à 7 minutes 46 secondes).

Or, aujourd’hui, on apprend en lisant Canoë que la FCSQ tiendra un sommet national sur l’éducation à Québec les 31 mai et 1er juin 2012 afin de créer un projet de «commission scolaire nouvelle».

L’exercice consistera au final à réduire les contraintes administratives imposées aux écoles, valoriser l’école publique, redonner une légitimité aux commissaires via les élections scolaires et ainsi faire taire les mauvaises langues qui souhaitent la disparition des commissions scolaires.

La présidente annonce qu’il y aura des changements importants mis en branle dès octobre et, seulement deux jours plus tard, dit qu’elle consultera divers intervenants quant à un nouveau modèle de commission scolaire en début juin. Compte-t-elle oublier les changements qu’elle a pourtant annoncés il y a deux jours ou tenir une consultation sur des changements qu’elle aura déjà mis de l’avant sept mois plus tôt?

Honnêtement, je ne comprends pas. »