Le Kiosque souhaite à Jean-François Gingras la bienvenue dans le monde réel de certaines associations étudiantes du Québec.

Lettre de Jean-François Gingras publiée dans La Presse

L’auteur est étudiant à la majeure en histoire à l’UQAM.

« J’ai participé pour la première fois à l’assemblée générale de l’Association facultaire étudiante des sciences humaines (AFESH) visant à se prononcer «pour» ou «contre» la grève générale illimitée. On n’oublie jamais la première fois. Ce serait, me disait-on, une des rares fois où l’on peut participer à un exercice de démocratie directe.

Dès le début des propositions, le ton est donné: la grève est la seule option. Pas d’information sur les risques associés à cette grève, ni à propos des horaires de cours bizarres, compressés qu’on risque de vivre au retour. Bref, beaucoup d’opinions, peu de faits, rien de concret.

[…]

Autre chose me laisse quelque peu dubitatif: le processus. Les salles ont une capacité d’environ 1000 personnes… alors que l’AFESH en représente 4623. Comment s’exprimeront les 3600 autres membres?

Un représentant de l’AFESH répondait à la question demandant pourquoi le scrutin n’était pas secret: un vote secret est une action individuelle, alors qu’une assemblée est plutôt une action collective!

[…]

À notre faculté des sciences humaines, l’option «pour la grève» l’a emporté avec 80% des voix. Verdict solide? Seulement 780 personnes (17% des étudiants) ont voté «pour», engageant ainsi 4623 étudiants… »

 

Le journaliste Gil Courtemanche écrivait en 1989 :

« Comme toujours, les premiers et les derniers à faire la manchette sont les étudiants en sciences humaines de l’UQAM, ou plutôt les quelques centaines d’étudiants à quart ou à vingtième temps, qui parlent régulièrement au nom des 12 000 étudiants de cette famille […]

En rapportant un événement ou des propos, les médias les font exister. Dans une certaine mesure, ils les créent. Et ils nous arrivent souvent de donner corps à des fantômes. Qu’y a-t-il de plus mensonger que le titre suivant : « Les étudiants du collège X déclarent la grève », quand on apprend dans le troisième paragraphe que 235 étudiants sur 400 ont décidé de fermer un collège fréquenté par 3000 étudiants? Il n’y a qu’un titre qui puisse témoigner de cette réalité et c’est « 7.8 p. cent des étudiants du collège X votent en faveur de la grève ». Par inconscience, par paresse et souvent par affinité avec tous les mouvements contestataires, nous entrons régulièrement dans le jeu des activistes minoritaires, des professionnels de la conférence de presse, des coprs intermédiaires qui ne représentent que le nombre de lettres qui composent leur sigle compliqué.” (Douces colères, VLB, 1989, pp. 143-144)

 

Le Kiosque a déjà publié:

Un jour, on peut rêver, quelqu’un se posera des questions sur l’opacité des finances des associations étudiantes