L’importance de l’histoire : grande entrevue avec l’historien Charles-Philippe Courtois
Le blogue de Mathieu Bock-Côté
« La critique du nouveau programme d’histoire du Québec et du Canada au secondaire est absolument inséparable de la critique de la réforme. La réforme a aboli beaucoup de choses : la moyenne de groupe, le bulletin traditionnel, le plus possible la possibilité qu’un élève échoue et même la référence aux disciplines. Ainsi, il n’y a plus de profs de biologie ou d’histoire, mais des profs de sciences ou d’univers social, qui ont un bac en pédagogie où sont saupoudrées plusieurs matières pour former un prof apte à enseigner les cours de « sciences » ou « d’univers social ».
(…) il faudrait se pencher sur les contenus des nouveaux programmes. Ceux-ci ne visent pas à favoriser l’acquisition d’une culture générale commune, québécoise et occidentale, ni d’un sens critique. Il s’agit de centrer la matière sur des questions d’actualité, supposément pour mieux retenir l’attention des élèves et mieux les garder sur les bancs d’écoles, (…) sans oublier leur initiation à un petit catéchisme de « l’ouverture à l’autre » et de « l’ouverture au monde », toujours dans cette perspective : il faut qu’ils s’adaptent à un marché du travail mondialisé et il faut quand même assurer que leur opinion, qu’on les encourage à exprimer, reste politiquement correcte… Voilà ce qui est jugé essentiel, pas le contact avec les lettres, l’histoire, la philosophie ou les mathématiques…
le nouveau (programme) s’évertue à présenter la majorité comme un groupe ethnique parmi d’autres sur un territoire multiculturel et à détourner le plus possible le regard des conflits nationaux dans notre histoire. A l’exemple de la réforme dans son ensemble, le nouveau programme d’histoire, Histoire et éducation à la citoyenneté, refuse la hiérarchie entre le professeur et l’élève. (…)
Il n’y a pas jusqu’au dernier scandale du printemps, avec l’affaire « Magnotta à l’école » qui n’en donne l’illustration par la caricature. Le pauvre prof qui a choisi bêtement de laisser ses élèves visionner la vidéo du tueur après un vote n’a fait qu’appliquer avec un zèle idiot ce que préconisent ce programme et la réforme, c’est-à-dire la démocratie dans la classe, sans hiérarchie entre prof et élèves, et un contenu non pas centré sur ce savoir et cette culture générale barbantes, qui demanderaient du travail et risqueraient de faire échouer ou décrocher les élèves, mais centré sur eux, sur ce qu’ils connaissent et sur l’actualité.
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Le Kiosque a publié
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La réforme scolaire: né pour un petit bulletin
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Contre la réforme pédagogique. Sous la direction de : Robert Comeau et Josiane Lavallée. VLB éditeur, 2008.
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Ce livre n’est vraiment pas un Harlequin. Écrit par des personnes qui se débrouillent fort bien en pédagogie et qui s’adressent à un public très averti, Contre la réforme pédagogique (sous la direction de Robert Comeau et Josiane Lavallée, VLB éditeur) ne risque pas d’être un best-seller et donc d’ébranler notre imperturbable ministère de l’Éducation. Pourtant, il est crucial pour comprendre comment le Québec s’est retrouvé avec une réforme pédagogique dont personne ne voulait sauf un petit groupe d’idéologues. Les auteurs parlent de «manipulations notables». Le Kiosque a fait bouillir ce livre pendant quelques mois pour en extraire l’essentiel. Édifiant et révoltant.
«Cette réforme (…) aura indéniablement contribué à un nivèlement par le bas des exigences à l’égard des élèves.» – Robert Comeau et Josiane Lavallée