Le blogue de Joseph Facal
Nous vivons à une époque qui se veut si furieusement moderne qu’on en est venu à la qualifier de postmoderne ou d’hypermoderne. Dans ce climat intellectuel, quiconque évoque le passé des francophones d’ici passe presque d’emblée pour une sorte de nostalgique dépassé. S’il insiste trop sur le caractère douloureux de ce passé, sa cause est entendue : il fait dans le repli victimaire, la crispation identitaire et le grattage de plaie, en plus d’être, évidemment, «frileux».Or, pour moi, cette affaire est claire et nette : il faut dire non. Simplement et fermement. On ne construit rien de solide si on ne sait pas qui on est et d’où on vient.
Non, ce n’est pas passéiste que de se donner comme grille d’interprétation que l’histoire politique du Québec, c’est d’abord celle d’une communauté qui fut conquise par les armes, occupée, dépossédée, annexée, mise en minorité, et à qui ses élites prêchèrent, plus souvent qu’autrement, la soumission et la résignation. Cette trame ne suffit évidemment pas pour englober et expliquer la totalité de notre parcours historique. Mais si elle n’est pas la seule, elle est la principale. Notre histoire, si elle n’est pas que cela, est d’abord l’histoire d’une volonté de durer, qui se transforme progressivement en désir de s’affirmer, puis de s’émanciper, dans le contexte évidemment difficile qui est le lot de toutes les nations minoritaires conquises par les armes. C’est cette trame qui doit demeurer pour moi le fil conducteur central – et non unique – du parcours historique de la nation québécoise. Si des immigrants, comme moi, veulent s’y joindre, tant mieux. Je ne souhaite pas autre chose.