Sur les Indiens du Canada, Le Kiosque a publié:
L’assimilation un droit, un devoir…
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Extrait:
Après la guerre de 1939—1945, un comité conjoint du Sénat et de la Chambre des communes est constitué pour examiner la Loi des Indiens. Pour la première fois, ceux-ci sont consultés: ils déclarent vouloir rester une nation distincte et séparée plutôt que de devenir individuellement des citoyens de seconde classe sous la loi générale du pays. En 1946-1947, un conseiller indien est engagé pour la première fois, en la personne d’un avocat iroquois. On demande aux associations autochtones de faire des représentations. Quelques-unes se présentent, de l’Alberta, du Manitoba de la Colombie britannique, ainsi que les chefs héréditaires de Brandford et des conseils de bande. Mais le comité est beaucoup plus intéressé par le plan de l’anthropologue Diamond Jennes « Plan for liquidating Canada’s Indian problem in 25 years. »
La nouvelle loi, adoptée le 17 mai 1951, ignore complètement les avis indiens et apporte peu de changements importants. Sont abolis les règlements qui interdisent le potlach et la danse du soleil; l’affranchissement automatique des universitaires est également supprimé. Quelques amendements importants sont apportés à la protection des terres indiennes et les pouvoirs du conseil de bande sont précisés, mais pas élargis ; Yves Thériault écrira à ce sujet : « Le conseil de bande n’a aucun pouvoir réel. Il se trouve dans la même situation que le gouverneur et les parlements lorsque le Canada était une colonie britannique. Aucune loi votée, aucune décision n’était valide sans l’approbation de Londres. Les conseillers et les chefs peuvent voter toutes les résolutions qu’il leur plaît; rien ne se produira si elles ne sont pas approuvées par Ottawa. Et les gens à Ottawa, qui approuvent, sont à des centaines, à des milliers de milles de cette réserve, ne l’ont jamais vue dans la plupart des cas, ne comprennent rien aux problèmes et prononcent leurs jugements dans un état béat d’ignorance .» (Maclean, avril 1967)
De ce fait, les conseils de bandes ne pourront jamais empêcher les Affaires indiennes de mettre en place un autre grand plan d’assimilation, car si la politique a un peu changé ses couleurs, le but reste le même. En 1954, le responsable des Affaires indiennes, J.W. Pickersgill, déclare: «There is no doubt that eventually we want the Indians to be completely emancipated and enfranchised and just be ordinary citizens.»
Le défi est de taille car si, de 1880 à 1940, le nombre d’Indiens est resté stable, tout change à partir de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. La population indienne augmente; il ne s’agit pas ici du baby boom qui se manifeste à la grandeur de l’Amérique, mais des effets de la baisse de la mortalité infantile due à ces drogues miracles que sont les antibiotiques. Les réserves, même celles qui ont été créées peu de temps auparavant, débordent.
Par ailleurs, il faut aussi se demander comment assimiler efficacement ces Dénés, ces Cris, ces Innus, qui vivent toujours en nomades de chasse et de pêche dans la forêt boréale ; ils représentent tout de même la moitié de la population indienne du Canada. D’Ottawa, encore une fois, jaillit la lumière: si les Indiens n’entrent pas volontiers dans le monde civilisé, c’est parce qu’ils ont peur. Les Indiens du nord sont encore moins prêts que les autres à affronter un milieu qui ne leur semble pas accueillant. Il faut donc les préparer et, pour ce faire, fixer une fois pour toutes ces populations dans des réserves. Durant les années cinquante, on déporte les derniers nomades dans ce qui représente pour eux des camps de réfugiés. Ce n’est pas sans mal, car les Indiens refusent de se laisser mettre en cage. Mais là au moins, on ne crève pas de faim, puisqu’on y distribue les rations du fédéral. L’une après l’autre, les bandes se rapportent et, en 1957, même les plus irréductibles, les Naskapis, vivent en réserve. Leur histoire est d’ailleurs un bon exemple de ce qui s’est passé pour les peuples de la forêt boréale.