Un livre écrit par un ex-fonctionnaire se fait massacrer.
Réjean Morissette, Les Autochtones ne sont pas des pandas : Histoire, autochtonie et citoyenneté québécoise
Montréal, Éditions Hurtubise, 2012
Son texte, « La fable autochtone », a été publié par La Presse.
Critiques
Pierre Trudel, Anthropologue, et Éric Cardinal, consultant et professeurs, tous deux experts des questions autochtones
L’auteur du livre « Les Autochtones ne sont pas des pandas », Réjean Morissette, a réussi à faire publier un texte dans le journal La Presse du 10 janvier 2013. Cet article reprend plusieurs faussetés et fabulations contenues dans son essai, que l’on devrait plutôt appeler un pamphlet, rempli de clichés, de gros préjugés et d’opinons personnelles non-fondées (et souvent présentées comme des faits). De plus, il y a tellement de faussetés qu’on doit conclure que son titre, lui aussi, est faux… nous amenant donc à affirmer que « les Autochtones sont des pandas » !
Voici un petit aperçu de que l’on retrouve dans son livre.
– À la page 58, l’auteur confond le Nunavik et le Nunavut, et ce dans un livre sur les Autochtones au Québec !
– Il affirme que le gouvernement fédéral et l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador ne reconnaissent pas les Inuits comme des Autochtones! (p.31), ce qui est complètement faux.
– À la page 36, il y aurait 3 communautés mohawks au Canada, et à la page suivante, il y en a 4. Les deux chiffres sont faux.
– Après avoir dénoncé le fait que ceux qui s’attaquent à l’orthodoxie autochtoniste sont accusés de racistes, voici comment il particularise les Mohawks des autres autochtones du « Québec » avant l’arrivée des Européens : « Ils (les Mohawks) ne firent que piller leurs voisins sans défense, violer leurs femmes, massacrer les personnes faibles et handicapées … » (p.61). Si ce vocabulaire n’est pas du racisme, dites-nous ce que c’est!
– Bien que dénonçant les anthropologues, l’auteur s’avance sur leur terrain en écrivant que les villages mohawks auraient eu une « haute palissade, laquelle protégeait des animaux sauvages, entre autres les ours. » On aime bien la précision et la logique! On comprend que les autres autochtones massacrés par les Mohawks n’attaquaient jamais les Mohawks. Seuls les ours les menaçaient!
– « Seulement trois nations populeuses utilisent le français comme langue d’échange avec les Québécois, à savoir les Hurons-Wendats, les communautés innues et les Attikamekws », écrit-il. La formulation est fausse et trompeuse. Elle est fausse car l’auteur oublie de mentionner la nation abénaquise, ainsi que les nations algonquine et micmac, dont une très grande partie s’exprime en français. Elle est trompeuse parce qu’en utilisant le mot “populeuse”, l’auteur veut éviter d’informer le lecteur que la “petite” nation Malécite est aussi formée de locuteurs francophones. Bref, contrairement à ce que laisse croire l’auteur, c’est une majorité de Premières Nations qui s’expriment en français dans leurs échanges avec les Québécois. On pourrait même ajouter une population mohawk de plus en plus nombreuse à s’exprimer en français, notamment celle vivant en milieu urbanisé de la région d’Oka.
– « Seuls les Atikamekws utilisent de manière généralisée la langue attikamek dans leur quotidien ». Les Innus seraient très étonnés d’apprendre qu’ils ne parlent plus leur langue ! Comme les Atikamekw, les Innus forment encore un groupe dont la langue est vivante et prédominante dans le quotidien (à l’exception d’une communauté).
Morissette fait donc le contraire de ce qu’il dit de faire. Ses affirmations ne sont pas appuyées par des « faits », ni des sources crédibles. Et elles insultent les gens avec qui il veut former une société respectueuse des différences. Bonne chance avec les Mohawks. La logique est aussi boiteuse que les faits avancés… Drôle de Coup de cœur de Renaud-Bray…
Aussi : Nicolas Houde dans la revue Amerika