Les finances publiques du Québec
Deux experts en économie publique, les professeurs Luc Godbout, de l’Université de Sherbrooke, et Claude Montmarquette, de l’Université de Montréal, ont publié un rapport.
Article de Pierre Fortin (L’actualité) sur le rapport Godbout-Montmarquette.
“Le budget du gouvernement provincial est pris en souricière. Il doit financer plus de dépenses avec moins de revenus !”
Réaction de l’Iris, think tank syndical sur le Rapport Godbout-Montmarquette
“silence complaisant et catastrophisme” écrit Simon Tremblay-Pepin, qui complète un doctorat en science politique à l’Université York.
Nous avons demandé à un économiste abonné au Kiosque ce qu’il pensait du texte de Simon Tremblay-Pepin
« La réplique de Simon Tremblay-Pepin n’est pas forte, forte…
D’abord, dans son deuxième alinéa, il blâme l’austérité (bien relative! Ce n’est pas la Grèce…) pour le manque à gagner du Québec. Une telle affirmation s’appuie sans le dire sur une forme de keynésianisme simpliste.
Car affirmer que le manque à gagner est dû à l’austérité, cela équivaut à dire que s’il y avait moins de rigueur (ou d’austérité), la stimulation économique qui en résulterait générerait suffisamment de revenus pour nous rapprocher de l’équilibre entre revenus et dépenses.
Or le Québec de 2014, ce ne sont pas les États-Unis de F.D. Roosevelt en 1936… Autre échelle, autre époque… Il est vrai qu’un gouvernement peut stimuler l’économie temporairement en dépensant plus qu’il ne récolte en revenus, mais temporairement. Le Québec est en déficit continu depuis le début de l’ère Charest et, même avant, il a rarement été en équilibre budgétaire. La marge de manoeuvre n’est plus là. Et en outre, une telle politique de stimulation est moins efficace pour un petit territoire comme le Québec que pour un continent comme les États-Unis.
Quand l’auteur écrit que le FMI “exhorte les différents pays du monde à s’abstenir de faire davantage appel à l’austérité”, il déforme la position de cette institution. Le FMI s’adressait plutôt à l’Allemagne et au Royaume-Uni, à la Banque Centrale Européenne et à l’UE, qu’aux pays en difficulté de l’Europe méditerrannéenne. Dans le cas du Canada, le FMI n’a pas suggéré d’en faire davantage; il a même mis en garde contre l’endettement des ménages et la possible surchauffe du marché immobilier.
Dans le troisième alinéa, Tremblay-Pepin lance des chiffres en l’air, sans référence. “En se basant sur les efforts qui ont été faits depuis 2010″… En d’autres mots, si on a réussi à mettre le couvercle sur la marmite, on peut continuer.
En fait, Godbout et Montmarquette se basent sur la performance de 2004-05 à 2013-14. Dans cette période, les coûts de reconduction auraient entraîné une augmentation de dépenses de 5,5% par année; cela a été contenu à 4,8%. En d’autres mots, même si le 5,5% surestime la croissance de dépenses à prévoir, il ne le surestime pas tant que cela. À la lumière de l’expérience récente, donc, on peut être presque certain que, même si l’augmentation des dépenses due à la reconduction des programmes est bien contrôlée, et qu’on arrive à la contenir en-deçà de 5,5%, il est invraisemblable d’espérer que le taux d’augmentation des dépenses de reconduction s’approchera de la cible de 2%.
Bref, le texte de Simon Tremblay-Pepin ne fait pas le poids. Et en gros, me semble que ce n’est pas sorcier: on ne peut pas éternellement dépenser plus que ce que l’on gagne, même si on est un gouvernement. Même la puissance impériale que sont les États-Unis se trouve affaiblie par des décennies de déficits accumulés.
Revenons chez nous: on peut discuter du comment et du calendrier, mais on ne peut pas laisser aller les choses sur l’allant. Ne rien faire, c’est graisser la pente sur laquelle nous glisserons vers une situation à la grecque. Moi, je préfère qu’on n’attende pas que les huissiers frappent à la porte. »