Extraits du Péril scolaire : les dix maux de l’éducation au Québec
LONGPRÉ, Tania. Péril scolaire : les dix maux de l’éducation au Québec, Montréal, Stanké, 2015, 160 p.
En Ontario, ainsi que dans les autres provinces canadiennes, on exige d’abord un baccalauréat de formation générale (langues, arts, mathématiques, éducation physique, informatique, science, musique, etc.) ou technique (construction, soins infirmiers, etc.). À ces trois années d’université, les futurs maîtres devront ajouter une année d’études en enseignement, ce qui donne quatre ans d’études universitaires, comme ici. […] (p. 41)
(Remarque du Kiosque: ici, c’est l’inverse, le gros des quatre ans d’études universitaires porte sur la pédagogie, la gestion de classe, la psychologie etc.) Conséquence, les profs connaissent peu leurs matières.)
Il existe un autre secteur de l’enseignement dont on parle peu : la formation professionnelle au secondaire, soit l’attestation d’études professionnelles (AEP) et le diplôme d’études professionnelles (DEP). Est-ce qu’un baccalauréat en enseignement est vraiment nécessaire pour enseigner aux étudiants qui suivent ce type de formation professionnelle? Présentement, un fleuriste voulant enseigner la fleuristerie doit s’inscrire à un baccalauréat à l’université pendant qu’il enseigne sa spécialité à ceux qui veulent l’exercer dans l’avenir. Même chose pour un plombier qui désire enseigner la plomberie aux élèves des DEP, ou au boucher qui veut enseigner son métier aux aspirants bouchers. Vaut-il vraiment la peine d’exiger d’eux un baccalauréat en enseignement de quatre ans? […] (p. 42)
En résumé, la formation des maîtres à tous les niveaux – que ce soit au préscolaire, au primaire, au secondaire ou à l’éducation des adultes – est à revoir de fond en comble. […] (p. 44)
Je faisais tellement de gestion de classe que je n’avais qu’une dizaine de minutes par cours pour enseigner. Un matin, un de mes élèves a jeté son dictionnaire par la fenêtre. Je l’ai envoyé au local de retrait, mais on m’a dit que je « ne devais utiliser ce moyen qu’en dernier recours, et que je devais apprendre à gérer autrement ma classe ». Ce n’est pas assez, jeter un dictionnaire par la fenêtre? Qu’est-ce donc qu’une « situation de dernier recours? » Fermer les yeux sur le premier bouquin lancé à l’extérieur et attendre que trois autres le suivent avant d’agir? Quelques semaines plus tard, dans un autre groupe, un élève s’est approché vraiment très près de mon visage et m’a menacée en ces termes : « M’a te frapper, ma crisse de chienne! » Lorsque je suis allée me plaindre à la direction en disant que je ne voulais plus de cet étudiant dans ma classe, on m’a répondu qu’on ne pouvait pas le suspendre plus de trois jours et qu’il reviendrait même s’il me faisait réellement peur. Quand les élèves savent que le pire qui peut leur arriver, c’est d’avoir trois jours de suspension, ils ne craignent pas de repousser certaines limites. […] (p. 68-69)
L’hiver dernier, dans la classe d’une de mes collègues, deux étudiantes adultes se sont absentées le jour de la Saint-Valentin parce qu’elles ne voulaient pas participer à la fête (on avait demandé aux étudiants de porter du rouge, entre autres). […] Pour ma part, j’ai utilisé récemment la chansonRemède miracle de Mes Aïeux dans mon groupe de francisation des adultes, pour illustrer la thématique « À la pharmacie ». Une jeune femme a levé la main pour me demander ce que voulait dire dans la chanson le mot « libido ». Quand je le lui ai expliqué, elle s’est bouché les oreilles en murmurant haram, haram (« interdit », en arabe). Quelques semaines plus tard, lors d’une activité pédagogique basée sur des extraits du film Séraphin, un homme et son péché, trois étudiantes ont demandé à sortir de la classe, puis à en être excusées, en raison de la scène où on voit les fesses de Roy Dupuis. J’ai exigé qu’elles demeurent dans la classe, mais elles ont fermé les yeux durant les scènes plus « physiques ». Voilà des exemples concrets du jonglage auquel se livrent quotidiennement les enseignants. (p. 132-133)
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Le point de vue des autruches:
“Nous avons un des meilleurs systèmes d’éducation au monde”. Réjean Parent, ex-boss de la Centrale de l’enseignement du Québec (CSQ).
“Nous avons un des meilleurs systèmes d’éducation au monde”. Denis Bastarache, coordonnateur régional, Centrale de l’enseignement du Québec (CSQ ) Mauricie- Nicolet (2012)
Josée Bouchard (Présidente de la Fédération des commissions scolaires) souligne que « le Québec a l’un des meilleurs systèmes d’éducation au monde et qu’il faut en être fier. » (publireportage paru dans Jobboom, vol 11, no 3, mai 2010, p.25.)
« Nous avons un des meilleurs systèmes d’éducation au monde, mais est-ce que ça fait des grosses manchettes ? », Le président de la Commission scolaire des Samares, François Charbonneau (2010)