L’héroïne aux États-Unis : comment la classe moyenne est devenue accro
Once associated with urban poverty, heroin is more popular — and deadly — than ever.
Heroin, U.S.A.: How the middle class got addicted, par Daniel Dale dans The Star
Le Kiosque a publié
Petite histoire de la guerre contre les drogues
Extrait:
(…)
Les mauvais musiciens: les musiciens de jazz…
La guerre a réduit l’héroïne à un filet qui provient surtout du Mexique. Sa pureté chute, les réserves s’épuisent. En 1945, il ne reste que 20 000 héroïnomanes aux États-Unis et le grand chef de la mafia, Lucky Luciano, a été déporté en Italie. Anslinger entretient l’inquiétude des Américains et son budget par quelques arrestations spectaculaires de vedettes, Gene Krupa, Robert Mitchum (marijuana), Errol Flynn (cocaïne), la chanteuse Billy Holiday et le saxophoniste Charlie Parker (héroïne).
En 1948, Anslinger, le chef du Bureau des Narcotique, commet sa première gaffe sérieuse. Il témoigne alors devant un Comité du sénat. « J’ai besoin de plus d’agents » dit-il. Les séanteurs lui demandent pourquoi.
-« Parce qu’il y a des personnes qui violent les lois sur la marijuana. »
-« Qui? »
-« Des musiciens. Je ne veux pas dire les bons musiciens, je veux dire les musiciens de jazz. »
En moins de 24 heures, 76 éditoriaux de journaux le massacrent y compris des éditions spéciales de revues musicales. En trois jours, le Département du Trésor reçoit 15 000 lettres.
Problèmes de personnalités?
C’est un fait que les meilleurs jazz bands du monde sont à Lexington avec des musiciens comme Chet Baker, Sonny Rollins ou Howard McGhee. C’est que la majorité des patients ne sont plus des Blancs, mais des Latinos et des Noirs, reflet des changements majeurs parmi les toxicomanes depuis la fin de la guerre. Ce qui n’est pas sans percer de sérieux trous dans la théorie qui fait alors, à peu près, l’unanimité et que résume bien un Comité de sénateurs canadiens:
« Selon les témoignages des médecins, la toxicomanie (…) est un symptôme d’une faiblesse du caractère et des défauts de la personnalité de la victime. Le toxicomane est d’ordinaire une personne émotivement déséquilibrée et instable à laquelle les stupéfiants donnent du «cran». (Comité spécial du Sénat sur le trafic de stupéfiants au Canada, 1955)
Ce qui voudrait dire que ces problèmes de personnalité ont cessé, collectivement, d’affecter les Blancs pour frapper les Noirs et les Latinos, qui soudainement, ont besoin de « cran ».
Du grand délire!
William Burroughs, qui est justement à Lexington en 1948, a écrit: « There is no pre-addict personality any more than there is a pre-malarial personnality, all the hogwash of psychiatry to the contrary. » L’historien des drogues David T. Courtwright confirme: « There is relatively little in the historial record to contradict Burroughs’ essential insight ».
Les chercheurs de Lexington, les seuls dans le monde à faire des recherches sérieuses sur les drogues, ont quand même balayé quelques mythes qui traînent dans le décor social depuis des décennies et publié les résultats dans des revues spécialisées: il est impossible de reconnaître, à l’oeil, les futurs toxicomanes. Ils ne sont ni malades mentaux ni déficients mentaux. Il est faux aussi, comme l’affirme la GRC, que les toxicomanes se droguent parce qu’is sont déjà criminels et non l’inverse. (…)