327902~v~L_anarchie_expliquee_a_mon_pereL’Anarchie expliquée à mon père 

de Thomas Déri et Francis Dupuis-Déri.

Ed. Lux (Coll. Instinct de liberté), 244 p., 10€

Un père éditeur et son fils historien remettent les pendules à l’heure, sans sectarisme, à propos de l’anarchie. Ce faisant, ils pourfendent un grand nombre d’idées reçues sur ce mouvement généreux et utopique, qui a toujours un peu nagé dans le flou.

 

Un article de la revue Inrocks

Les auteurs examinent ensuite les modalités d’application de l’anarchie selon les critères idéaux de ses adeptes. C’est là où le bât blesse, car on ne peut pas envisager de société anarchiste, selon ses principes hautement démocratiques, si quelques membres de la communauté sont hostiles à ses principes.

Ensuite, on peut soulever quelques problèmes découlant de l’éventuelle application de l’anarchisme, auxquels Francis Déri et son père n’accordent pas une grande importance. Notamment à propos de la police, honnie par les anarchistes puisqu’elle représente la forme d’autorité la plus visible et constante. “Que faire si un maniaque armé d’une tronçonneuse attaque ses voisins ?”, se demande Francis Dupuis-Déri, avant de répondre : “La communauté se réunira probablement pour trouver, ensemble, une solution.” Si la seule parade aux crimes est la concertation a posteriori, on se doute bien que dans une société anarchiste les citoyens lambda seront sans défense, à la merci du moindre alcoolique à la gâchette facile.

Mais pour les auteurs, une grande partie de la violence provient de la disparité entre les riches et les pauvres dans notre monde industriel. Pour un anarchiste, les délinquants ce sont les riches : “La bourgeoisie est composée de voleurs en veston-cravate qui vivent dans un luxe qui ne peut exister que si d’autres travaillent pour dégager des excédents”. Bref, pour aller vite, l’anarchie reste un vœu pieux, une belle utopie altruiste et égalitaire, qui pourrait difficilement devenir une norme. Selon FDD lui-même, les réflexions anarchistes sont plutôt fondées sur un rejet des contraintes. Rien de clairement constructif chez les théoriciens. “Il y a bien peu d’écrits au sujet de l’économie et de propositions économiques pour refonder la société sur des bases anarchistes.”

En fait, l’anarchie est avant tout une force de résistance, un garde-fou aux dérives autoritaires de la société. “Il est possible de concevoir l’anarchisme comme un processus ou une mise en tension dans un cheminement, jamais terminé, vers l’anarchie.” Une force libertaire d’avant-garde dont les idées qui paraissent utopiques à l’origine, finiront par être appliquées par la société bien plus tard. Comme l’explique FDD, une partie des revendications des anarchistes de la fin du XIXe siècle est entrée dans les mœurs au XXIe siècle.