LongpreTania Longpré

Journal de Montréal

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Enseignant aux immigrants depuis 2007, j’ai vu plusieurs étudiants devoir quitter le pays puisqu’on ne leur accordait pas le statut de réfugiés. Évidemment, ces histoires sont toutes touchantes, surtout lorsqu’elles impliquent des enfants, des maris, des femmes, des familles aimantes. Dans ce type de cas, nous jugeons surtout avec nos émotions.

(…) Dans la dernière décennie, nous avons pu voir une croissance exponentielle du nombre de gens en provenance de plusieurs pays de l’Amérique latine entrer au Québec sous un statut de demandeurs d’asile, dont énormément de Mexicains. (…)

En fait, certains immigrants réclamants ce statut ne sont pas du tout concernés par les crimes liés à la drogue, ils aspirent plutôt à une meilleure vie économique. Par contre, n’ayant ni les moyens ni les aptitudes pour réussir les examens de sélection de l’immigration Canadienne ou Québécoise, ils s’achètent plutôt un billet d’avion. Évidemment, cela coûte beaucoup moins cher que de vraies démarches d’immigration et donne dans tous les cas un résultat concret, du moins, dans les années durant laquelle leur dossier est à l’étude. Arrivés à l’aéroport, ils font une demande de statut de réfugiés et peuvent attendre jusqu’à quatre ans un procès qui leur accordera, ou pas, un statut de réfugié.

Durant le temps d’attente, ils peuvent obtenir un permis de travail, bénéficier de l’aide sociale et avoir accès aux soins de santé gratuitement. Pendant le processus judiciaire, les demandeurs d’asile se doivent de passer par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR), qui est à charge fédérale, puisque c’est le Canada qui régit une très grande partie des réfugiés et des demandeurs d’asile. Nous l’oublions souvent, mais le Québec n’a pas encore les pleins pouvoirs sur son immigration.

Ceux qui ne sont pas acceptés doivent donc retourner dans leur pays d’origine. Cependant, à la suite d’une décision négative de la Section de la protection des réfugiés, il est possible de présenter une Demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à la Cour fédérale du Canada. De plus, ils peuvent soumettre une demande d’Examen des risques avant le renvoi (ERAR). Une demande de motifs humanitaires peut aussi être déposée auprès d’Immigration Canada. Toutefois, cette dernière requête ne suspend pas les procédures de renvoi contrairement à la demande devant la Cour fédérale et la demande d’ERAR.

En 2012, les Mexicains demandeurs d’asile n’étaient acceptés que dans 11 % des cas. Pour cela, ils devaient détenir un dossier « béton » prouvant qu’ils étaient en danger. Certains, après quelques rencontres avec des avocats, se rendaient compte qu’il leur serait impossible de prouver qu’ils étaient« en danger » et constataient qu’ils seraient renvoyés dans leurs pays. Plusieurs sont alors prêts à retenir l’attention des médias et à étaler publiquement des histoires à fendre l’âme, mais qui n’ont souvent pas passé le test des tribunaux. La réalité, c’est que plusieurs demandeurs d’asile ne sont pas en danger. Ils aspirent plutôt à une meilleure qualité de vie. Si c’est le cas, ils doivent, à l’instar de tous les autres immigrants du monde, faire un processus régulier de demande d’immigration, et acquérir leur citoyenneté par de vraies démarches. Pour cela, ils doivent correspondre aux critères de sélection du Québec et du Canada. Les demandes d’asile basées sur des mensonges nuisent à ceux qui représentent honnêtement leur statut et qui fuient de vraies menaces. Je considère que ce « spectacle » humanitaire est injuste envers les immigrants qui dépensent leurs avoirs et leurs temps dans de longs processus réguliers, et ce, même si le cas concerne des gens ayant des enfants ou une famille.

On me dira « de droite » et j’assumerai, alors que je cherche plutôt la justice que l’immigration à deux vitesses. Je continuerai de penser qu’un pays ne doit pas devenir un club privé, ni un bar ouvert.