big-brother-poster-featureFrancine Pelletier

Le Devoir

L’année : 1972. Le lieu : Santiago. On est un an et demi après l’élection de Salvaldor Allende au Chili, et un expert britannique en cybernétique, Stafford Beer, travaille à un projet qui, ultimement, ne pourra propulser le plan socialiste comme prévu, mais annonce le début du monde superinformatisé dans lequel on vit.

Le projet Cybersyn (pour « synergie cybernétique ») devait aider le gouvernement Allende à diriger l’économie selon des décisions basées sur des informations concrètes, tout en favorisant la « participation des travailleurs », tel que promis. À tout moment dans la journée, des données acheminées par télex (le Chili ne possède que deux ordinateurs en 1972) informeraient les dirigeants de ce qui se passait dans les usines du pays. Ainsi, l’économie pourrait être planifiée selon des faits réels, pas seulement selon des conjectures. Une « salle des opérations » avait été prévue à cet effet avec des écrans géants. Très futuristes, ressemblant à la cabine de pilotage du vaisseau spatial dans Star Trek, les installations de Beer auraient, dit-on, influencé l’esthétique prônée par Steve Jobs chez Apple, 40 ans plus tard.

À ce sujet, le Kiosque avait publié:

Big Brother

Cybersyn, une machine à gouverner le Chili

Vanity Fair

Google, Amazon et Uber en rêvaient, Stafford Beer l’a fait. Dans les années 1970 au Chili, ce geek barbu et pointu imagine Cybersyn, utopie informatique permettant de gérer toute l’économie d’un pays et d’anticiper les besoins des citoyens depuis une plateforme futuriste. EVGENY MOROZOV raconte les origines socialistes du cloud et des big data (et de leur dérive bureaucratique).